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mes plus belles dégustations oenologiques... ou les pire
17 octobre 2014

Vin & Santé colloque de l'Académie des Vins de France

Introduction


L'Académie du Vin de France exprime toute sa reconnaissance au Professeur Serge Uzan, Doyen de la Faculté de Médecine de l'Université Pierre et Marie Curie, qui a bien voulu accueillir dans l'amphithéâtre Charcot de la Pitié-Salpêtrière la table ronde qu'elle a organisée le 29 janvier 2014 à l'intention d'environ 150 participants, sur le thème du rapport du vin à la santé. Nous sommes pleinement conscients de l'audace d'un tel projet en un tel lieu, alors que les gouvernements successifs luttent à juste titre contre les risques graves que fait courir la consommation excessive de boissons fermentées et distillées à l'ensemble de la population, aux adolescents et jeunes adultes en particulier. Qu'il soit clair que nous adhérons pleinement à cette volonté salutaire de l'Etat, mais que nous connaissons aussi les risques d'addiction transgressive que la prohibition a fait et fait encore courir aujourd'hui, à la différence de l'éducation à la culture du vin et à la responsabilité. Peu de temps après notre rencontre, le 12 mars 2014, le Parlement européen a justifié notre initiative en votant par une majorité écrasante (530 voix pour, 74 contre et 14 abstentions) une résolution relative au patrimoine gastronomique européen au sein de laquelle il « estime qu'il convient de prévoir des cours d'éducation et de sensibilisation aux conséquences de la consommation excessive de boissons alcoolisées, d'encourager les habitudes de consommation appropriées et intelligentes par la connaissance des caractéristiques spécifiques des vins, de leurs indications géographiques, de leurs cépages, de leurs modes de production et de la signification des mentions traditionnelles. » C'est précisément l'une des missions de l'Académie du Vin de France qui exalte les vins de terroir qui ressemblent au lieu d'où ils viennent, à leur millésime et à la personnalité des vignerons qui les élaborent à l'intention de consommateurs aussi éclairés et exigeants que possible.
Le 15 avril 2014, le Sénat a voté un projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt dans le quel on peut lire-enfin !- l'article suivant (L665-6 du code rural) : « Le vin, produit de la vigne, et les terroirs viticoles font partie du patrimoine culturel, gastronomique et paysager protégé de la France. » Le Sénateur de l'Aude, Roland Courteau, auteur de ce texte, a également déposé le 23 décembre 2013 une proposition de loi modifiant le code de la santé et autorisant les opérations de parrainage, la propagande ou la publicité en faveur du vin et des boissons agricoles, à l'exclusion des médias destinés à la jeunesse et à la condition que toute promotion soit assortie d'un message incitant à la modération de la consommation et à la responsabilité du consommateur. Si elle était adoptée, ce sera la fin de la triste loi Evin de 1991, l'une des plus restrictives qui soit dans le groupe des pays producteurs de vin. Eduquons les jeunes et les adultes à une consommation raisonnable, sur le modèle de la Société des Alcools du Québec, monopole d'Etat qui prône depuis des années une manière civilisée de boire le vin sous le slogan de sa filiale Educalcool : « La modération a meilleur goût».
Dans les pages qui suivent, quelques éminents représentants de diverses branches de la médecine démontrent avec sérieux les bienfaits du vin, pourvu qu'il soit bu sans excès et, de préférence, comme c'est toujours le cas en Extrême-Orient, accompagné d'une prise alimentaire, même légère, ou, selon la tradition européenne, au cours des repas, ce qui est, en outre, le meilleur moyen de mettre en valeur leur personnalité et leur finesse. Qu'ils en soient chaleureusement remerciés et que le bon vin les conserve, nous conserve tous en florissante santé.


Jean-Robert Pitte , Membre de l'Institut
Président de l'Académie du Vin de France

 

Ouverture


Professeur Serge Uzan

Doyen de la faculté de médecine de l'université Pierre-et-Marie-Curie 

et directeur de l'Institut universitaire de cancérologie


Je serai bref car je dirige la rédaction du Plan cancer de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et je suis en cours d'audition. Je regrette de ne pas pouvoir rester plus longtemps à vos côtés. Néanmoins, je laisse le soin à David Khayat de me résumer ce qui va être dit. j'aimerais d'abord vous remercier car, grâce à l'annonce de ce colloque qui figurait dans Le Figaro et dans Le Monde, je me suis imposé dans les dîners en ville comme un expert en oenologie.
Je vous souhaite la bienvenue dans cette faculté où je suis arrivé en tant qu'étudiant le 1er septembre 1966 pour ne plus jamais la quitter. Elle est particulière puisqu'elle est aujourd'hui mariée à la faculté Saint-Antoine. Elle accueille 14 000 étudiants en médecine, en orthophonie, en psychomotricité et en infirmerie, 52 unités de recherche, 2 instituts hospitalo-universitaires sur le cerveau et la moelle et sur le cardiométabolisme. Elle oeuvre également dans la recherche sur le cancer et sur la vision. Nous avons la chance d'être dans une université riche en moyens, avec des étudiants motivés qui obtiennent des résultats très convenables.
Je vous souhaite encore la bienvenue et une bonne après-midi de travail.


Jean-Robert Pitte


Je vous remercie, cher collègue, de nous accueillir. Ce colloque a été organisé dans l'esprit de l'Académie du vin de France, Académie fondée en 1933 afin de défendre les vrais vins de France, issus du terroir, à une époque où le contrôle s'exerçait peu sur cette boisson.
L:Académie prône une consommation raisonnable de vin comme breuvage de culture et d'émancipation de l'âme humaine

Nous avons organisé quelques événements: l'un en 2009 pour honorer le cinquantenaire de la parution de l'ouvrage de Roger Dion, Histoire de la vigne et du vin en France, des origines au XIXe siècle; l'autre en 2011 sur l'amour du vin, qui a donné lieu à la publication d'un petit livre chez CNRS éditions, tout comme le premier colloque"'.
I'Académie est composée de 40 membres, dont la majeure partie sont des vignerons d'élite qui élaborent les meilleurs vins de France et qui sont des amoureux de ce que représente le vin dans la culture française. D'autres sont des défenseurs du vin par l'intermédiaire de l'écriture, de la presse ou d'autres instances. Nous nous trouvons très soudés dans ce combat pour une consommation raisonnable du vin. Il ne s'agit jamais de faire l'éloge de l'ivresse, mais plutôt de ce passage de l'Ecclésiaste: « Le vin, c'est la vie pour l'homme quand on en boit modérément. Quelle vie mène-t-on privé de vin? Il a été créé pour la joie des hommes, gaieté du coeur et joie de l'âme. Voilà le vin quand on en boit quand il faut et à sa suffisance. » Il faut donc en boire en fonction de son métabolisme et jamais en excès.
Le moment de notre colloque s'avère particulièrement bien choisi, car Roland Courteau, sénateur de l'Aude, qui est déjà intervenu lors d'un précédent événement, avait essayé de faire passer un texte de loi il y a deux ans. Il cherchait à affirmer que le vin fait partie intégrante du patrimoine culturel et gastronomique de ce pays. Il vient de récidiver le 3 octobre 2013 en déposant un nouveau projet de loi
sur le même thème au Sénat et, le 23 décembre, il a déposé un autre projet de loi visant à distinguer le vin des autres boissons alcooliques.
Je vous livre le début de l'exposé des motifs: « Mesdames, Messieurs, seule dans le règne végétal la vigne nous rend intelligible ce qu'est la véritable saveur de la Terre, a écrit Colette. La vigne est considérée par les spécialistes comme une des plus anciennes plantes du monde actuel [ ... ] Le vin correspond à une culture, à des traditions, à l'histoire des hommes et des femmes de régions entières, et il entre dans l'alimentation traditionnelle de consommateurs depuis des siècles. La communication sur le vin se veut avant tout informative, éducative et personnalisée. Elle consiste à orienter le choix d'un consommateur responsable vers les produits les mieux adaptés à la gastronomie et aux circonstances, et non pas à encourager une consommation excessive. Il ne s'agit donc pas d'une incitation à plus de consommation, mais bien d'une initiation à la découverte. » Notre colloque vise ce même objectif : vous parler du vin comme boisson de culture, qui peut rendre d'éminents services à l'homme du point de vue de sa santé.

 

Histoire des rapports entre le vin et la

santé de l'Antiquité, à nos Jours


Dr Marc Lagrange
Chirurgien digestif au Centre hospitalier de Nevers


J'aimerais retracer brièvement la relation étroite qui s'est créée entre le médecin, le soignant et le vin depuis les pharaons jusqu'à aujourd'hui. La boisson ordinaire des Égyptiens est la bière. Le vin est pour eux un marqueur élitiste et en même temps une médication.
En gynécologie, le mélange d'oignons et de vin est utilisé pour les troubles des règles. Pour les tests de grossesse, on absorbe un mélange de jus de dattes, de vin et de diverses plantes: un vomissement indique un résultat positif. Pour l'ivresse, qui a toujours été dénoncée, le chou constitue depuis ces temps reculés un antidote efficace. Il serait d'ailleurs intéressant d'étudier les molécules  du chou qui semblent  modifier le métabolisme  de l'éthanol au niveau hépatique, afin d'en faire une médication préventive.
En Grèce, on découvre la propriété antiseptique du vin grâceà l'éthanol. Le vin était utilisé pour traiter les humeurs. Hippocrate évoque le vin 468 fois. En proctologie, il conseille un onguent de vin fort mélangé à des oeufs pour éviter les inflammations. En matière de gynécologie, il recommande des instillations de vin rouge. Hippocrate affirme encore que le miel et le vin sont merveilleusement appropriés à l'homme si on les utilise avec à-propos et juste mesure. Il recommande de ne pas boire plus d'une cotyle, soit 0,271 de vin par jour. L'institution médicale prônait déjà la modération. Pline, au Ile siècle après Jésus-Christ, soutient que le vin est un doux médicament. Il établit plus de 66 sortes de médications à base de vin, soit comme support, soit comme apport. Le vin rouge traite plutôt les troubles gynécologiques tandis que le vin blanc soigne les troubles urologiques. Il affirme que cette boisson entretient les forces, le teint et la mine. Instruit au sein de la fameuse école de médecine de Salerne, Arnaud de Villeneuve écrit au XIII' siècle que le vin dégage les conduits et soulage le foie et la rate engorgés de mauvaises graisses. Au Moyen Âge, les monastères ont cinq bonnes raisons de cultiver la vigne: la consommation des moines, celle des hôtes, croisés, pèlerins ou voyageurs, la célébration de l'eucharistie, le commerce et l'apothicairerie. Saint Benoît conseille à ses moines, afin qu'ils restent alertes, une consommation moyenne d'une hémine, soit environ 0,25 l de vin par jour. À la fin du Moyen Âge, on retrouve de la même façon, dans un livre de médecine, la recommandation de boire un demisetier, soit 0,23 l de vin par jour. Comme dans l'Antiquité, on mêle souvent au vin des plantes aux vertus thérapeutiques (sauge, menthe, etc.), des poudres minérales et des extraits d'animaux. Dans le Berry, on a longtemps conseillé de mélanger de la poudre de lombric avec du vin contre les douleurs rhumatismales. À cette époque, le vin est toujours très lié au sang. Pendant la Renaissance, Rabelais affirme que le vin gratifie l'entendement, chasse tristesse, donne esprit et joie. Il est évident que les bons vins agissent comme des euphorisants. Louis XIV se fait régulièrement soigner à partir de médicaments préparés à base de vin. Il meurt en 1715, comme le grand vigneron Dom Pérignon, et, à partir de cette année, on commence à boire le vin pur (le champagne mousseux surtout) alors qu'autrefois on le mélangeait toujours avec de l'eau, pratique qui ne cessera complètement que dans la deuxième moitié du xxe siècle.
En 1853, le Suédois Magnus Huss identifie l'ivresse répétée et l'alcoolisme comme une maladie qui abrège l'existence. Pasteur décrit l'alcoolisme de la façon suivante: « Si le vin est la plus saine et la plus hygiénique des boissons, c'est pour lutter contre l'ivresse. » La Chine lutte à ce même moment contre l'alcoolisme lié à l'alcool de riz. A la fin de ce siècle, le vin perd son statut de médicament et l'industrie synthétise les produits actifs tels que l'aspirine.  Au xxe siècle, de nombreuses thèses sur l'hygiène sont soutenues.La société des Médecins amis du vin de France apparaît. En 1991, l'année de la malencontreuse loi Evin, le professeur Renaud identifie le french paradox : les Français bénéficient d'une immunité cardiovasculaire grâce à leur consommation modérée de vin rouge. Le Pr Yves Cottin du CHU de Dijon a d'ailleurs travaillé sur le diabète : il semblerait que la prise de vin pendant les repas permette une meilleure régulation du diabète. Boire 0,25l  de vin (la même dose depuis l'Antiquité) donne une plus grande longévité et moins de complications. Les biologistes l'ont expliqué par la présence des polyphénols (environ 3 à 5 g dans le vin rouge). L'action de ces derniers fluidifie le sang, entraîne une baisse du mauvais cholestérol, possède des effets relaxants et améliore la digestion. Ainsi, l'ivresse a été constamment dénoncée par les médecins tout au long de l'histoire, mais une consommation raisonnable de vin, d'environ un quart de litre, a toujours été très conseillée. Théognis, poète grec du VIe siècle avant J-C disait que: « Le vin bu en abondance est un mal, mais si on le boit avec modération il devient un bien» et le grand sommelier Philippe Faure-Brac a coutume de dire: « Il ne faut pas boire pour oublier mais déguster pour se souvenir. »

 

Vin et maladies cardiovasculaires
Professeur André Vacheron
Président honoraire de l'Académie nationale de médecine
Membre de l'Institut


C'est le médecin cardiologue qui va vous livrer ses réflexions
sur une boisson incomparable, le vin, connu depuis la haute
antiquité puisqu'on en trouve mention dans les tombes et les temples
égyptiens 4 000 ans avant Jésus Christ.
Au 4ème siècle avant notre ère, Hippocrate vante les vertus
médicinales du vin et en condamne l'excès au même titre que les abus
des plaisirs amoureux qui peuvent, selon lui, altérer la santé. Il est
écrit au chapitre XL de l'Ecclésiaste Bonum vinum laetificat cor hominis.
Aujourd'hui, le matraquage médiatique contre le sucre, le sel, le beurre,
le surpoids, la sédentarité fait rage et n'épargne pas le vin. Et pourtant
beaucoup d'études scientifiques de qualité démontrent depuis une
trentaine d'années les bienfaits du vin consommé modérément.
En 1979, dans le célèbre journal anglais Lancet, Saint-Léger
signale une relation inverse entre la consommation moyenne de vin et
la mortalité cardiovasculaire dans 18 pays, observation fondée sur les
certificats de décès.
Lannée plus tard, en 1980, cette constatation est confirmée par
l'épidémiologiste américain Keys avec l'étude des 7 pays qui démontre
l'effet cardiovasculaire favorable d'une alimentation riche en fruits et
en légumes accompagnée d'une consommation modérée de vin.
Publiée dans le Lancet en 1994 et dans Circulation en 1999,
l'étude lyonnaise de Serge Renaud, chercheur à l'INSERM et de
Michel de Lorgeril portant sur la prévention de la récidive d'infarctus
cardiaque chez 605 coronariens âgés en moyenne de 53,5 ans par le régime méditerranéen complété par une margarine riche en acide
alphalinolénique démontre l'effet bénéfique d'une consommation
modérée de vin, indépendamment de celui de l'acide alphalinolénique :
sous régime méditerranéen versus régime de type occidental dans
lequel les lipides représentent 31 % de l'apport calorique global et
les graisses saturées 10.5 %, l'incidence des décès d'origine cardiaque
et des infarctus myocardiques non mortels a diminué de 73 % après
27 mois et de 72% après 46 mois. En 1991 dans une émission restée
célèbre sur CBS réalisée avec Serge Renaud, les américains font état
du paradoxe français: en dépit de facteurs de risque importants, d'une
alimentation riche en beurre, en fromages et en graisses saturées,
la mortalité cardiovasculaire en France est l'une des plus faibles du
monde après la japonaise où l'alimentation à base de riz et de poisson
est infiniment plus triste.
En 1994-1999, l'étude Monica (Monitoring Cardiovascular
Disease) mise en place par l'OMS, confirme la diminution de la
mortalité cardiovasculaire chez les buveurs modérés de vin (1 à 3
verres par jour) rejoignant ainsi les recommandations de Saint Benoit
à ses moines (une hémine par jour).
En 1995, Morten Gronbaek à Copenhague retrouve une
diminution nette de la mortalité cardiovasculaire et même de la
mortalité globale chez les consommateurs modérés de vin dans une
cohorte de 13 285 hommes de 30 à 70 ans suivis pendant 10 à 12 ans,
le bénéfice du vin s'avérant nettement supérieur à celui de la bière.
Serge Renaud en Lorraine fait la même constatation dans une
cohorte de 34 000 hommes suivis pendant 12 ans.
Enfin, l'étude européenne EUROASPIRE démontre une
diminution de la prévalence de la maladie coronaire du Nord au Sud
de l'Europe, allant de pair avec la diminution de la consommation
d'alcool distillé et l'augmentation de la consommation du vin dans ce
gradient Nord Sud.
A côté des facteurs innés, d'origine génétique, les populations du
Sud de l'Europe et notamment des pays méditerranéens ont cependant
d'autres caractéristiques nutritionnelles:

- plus faible ration calorique,
- plus faible consommation de lait et de viandes rouges,
- plus forte consommation de poisson, de fruits et de légumes.
Le paradoxe français n'est pas un leurre. Il mériterait plutôt
d'être appelé paradoxe méditerranéen car l'incidence des événements
cardiovasculaires en France est similaire à celle des pays voisins, Italie,
Espagne, Grèce avec une diminution encore plus nette en Crète.
La bénéfice spécifique du vin n'est établi que sur les données
épidémiologiques et seulement pour des consommations modérées de
2 à 3 verres par jour. Les études prospectives qui ont comparé l'effet
du vin à celui d'autres boissons alcoolisées comme la bière, indiquent
que le vin réduit non seulement mieux le risque vasculaire mais aussi
la mortalité globale. Comment explique-t-on cette supériorité du vin
sur les autres alcools: par la présence en quantité plus importante de
polyphénols. Connus pour avoir in vitro des propriétés antioxydantes,
les polyphénols protègent les LDL lipoprotéines de l'oxydation. Il est
établi aujourd'hui que les LDL oxydées sont captées par les macrophages
issus des monocytes sanguins qui ont traversé l'endothélium artériel
altéré par les turbulences du flux sanguin, , le monoxyde de carbone,
les amines vasopressives, l'hypercholestérolémie chronique. Les
macrophages se transforment en cellules spumeuses et rel arguent des
cytokines et des facteurs de croissance qui stimulent la prolifération
des cellules musculaires lisses de la paroi artérielle. Ces cellules
migrent dans l'intima et produisent de la matrice fibreuse autour du
coeur lipidique athéromateux aboutissant ainsi à la formation et au
développement des plaques d'athérosclérose qui réduisent peu à peu la
lumière artérielle. Lorsqu'elles se fissurent, ces plaques se recouvrent d'un
caillot sanguin progressivement obstructif qui aboutit à l'oblitération
artérielle et à l'arrêt circulatoire générateur d'infarctus cardiaque.
Dans la grande famille des polyphénols, ce serait la quercétine et
surtout le resveratrol, un trihydrostilbène présent dans le vin rouge
à la concentration moyenne de 5 mg/I qui seraient responsables des
effets bénéfiques du vin. Le resveratrol existe aussi dans la plupart des
vins blancs mais à très faible concentration « 0.1 mg/\). On en trouve
cependant dans les vins blancs portugais et suisses à la concentration moyenne de 2 mg/I ainsi que dans le porto. La dose bénéfique serait
celle obtenue en buvant 3 à 4 verres de vin rouge par jour, c'est-à-dire
une trentaine de microgrammes/kg/jour.
Le resveratrol est un antioxydant qui protège à la fois le
myocarde et le cerveau de l'ischémie. C'est également un vasorelaxant
qui augmente la biodisponibilité du monoxyde d'azote. C'est
un anti-agrégant plaquettaire comme l'aspirine. Il a enfin une action
anti-inflammatoire inactivant la Cox 2.
Une étude expérimentale de Wang Z. et collaborateurs publiée
dans Int. J. Mol. Med (2005, 16, 533-540) démontre son action
antiathérogène. Chez le lapin rendu hypercholestérolémique par un
régime enrichi en cholestérol, l'administration d'une préparation de
vin rouge sans alcool contenant des quantités connues de resveratrol,
empêche le développement des plaques d'athérome sans modifier la
lipidémie.
Cette multiplicité des mécanismes d'action bénéfique se
retrouve en cancérologie et pourrait être intéressante pour ralentir le
vieillissement en activant les sirtuines qui jouent un rôle important
dans la longévité. Commencée en 1988 et publiée en 1997, l'étude
PAQUID réalisée par les Professeurs Dartigues et Orgogozo sur plus
de 4 000 personnes âgées de plus de 65 ans, résidant en Gironde et en
Dordogne, démontre qu'une consommation régulière de 3 à 4 verres
de vin par jour, réduit le risque de maladie d'Alzheimer. Le danois
Truelsen en 1998, rapporte une réduction de 30 % du risque d'accident
vasculaire cérébral chez les buveurs de vin.
Une étude du Professeur Roger Corder du William Harvey
Recherche Institute de Londres parue dans Nature fin 2009, indique
que l'effet vasodilatateur du vin serait dû aux procyanidines plutôt qu'au
resveratrol et s'expliquerait par l'inhibition de la synthèse d'un vasoconstricteur
artériel puissant: l'endothéline 1. Le Professeur Corder
et son collègue expliquent que ce mécanisme pourrait expliquer
l'association forte entre la consommation de vins traditionnels
tanniques et le bien être global avec la grande longévité des habitants
du sud-ouest de la France, notamment du Gers et de la région de Noro
en Sardaigne. Une équipe INSERM d'Angers attribue cependant à la delphinidine, un polyphénol présent dans le vin rouge, l'effet
vasodilatateur par activation d'un récepteur aux estrogènes stimulant
la production de monoxyde d'azote par les cellules endothéliales de la
paroi artérielle.
Les mécanismes de l'action bénéfique du vin sur la paroi artérielle
sont certainement multiples : la diminution de l'athérogenèse et
la prévention de la thrombose me paraissent les plus importants et
sont surtout l'apanage des vins rouges produits en barriques de chêne
avec des périodes de fermentation de quelques semaines permettant
la pleine extraction des tanins particulièrement riches en composés
phénoliques, notamment en procyanidines. Le Cabernet sauvignon,
le Meriot et le Pinot noir donnent les vins les plus riches en tanins.
Leurs effets anti-oxydants, anti-athéromateux, anti-agrégants sont très
supérieurs à ceux du vin blanc en expérimentation animale.
Produit naturel merveilleux, le vin doit cependant être consommé
avec modération. Il faut garder raison et apprendre à le déguster
pour en obtenir tous les bienfaits: ne jamais boire à jeun en raison
du risque d'alcoolémie brutale, se souvenir qu'un verre de vin apporte
100 kilocalories et 10 grammes d'alcool en moyenne et savoir qu'une
consommation chronique régulière d'alcool en quantité importante  favorise l'hypertension artérielle

 

Vin et athérothrombose


Pr Ludovic Drouet
Chef du service d'angio-hématologie à l'hôpital Lariboisière


Je prendrai la suite d'André Vacheron pour vous faire
comprendre comment nous pouvons réaliser des recherches
sur ce sujet. Premièrement, nous avons besoin d'un financement. Il y
a une dizaine d'années, le ministère de l'Agriculture avait lancé une
action nommée Onivins, qui s'était basée sur un financement d'État
pour s'interroger sur le bienfondé de l'assertion souvent formulée d'un
effet bénéfique d'une consommation modérée de vin sur la santé, et
plus particulièrement sur les maladies cardiovasculaires. Des travaux
ont été effectués avec plusieurs groupes français issus en particulier de
Dijon, de Bordeaux, de Montpellier, de l'INRA de Jouy-en-Josas et du
CNRS de Strasbourg.
D'un point de vue épidémiologique au début des années
2000, lorsque l'on regardait les résultats des études sur le lien entre
consommation de vin et maladies cardiovasculaires, J'ensemble des
données se révélait très cohérent: une consommation moyenne de 2
à 3 verres de vin par jour, était corrélée à une diminution du risque de
30 à 40 % de survenue d'un événement cardiovascuJaire grave.
Un groupe italien vient de publier récemment une actualisation
de ces résultats et montre de façon cohérente qu'une consommation
modérée de vin, est corrélée à une diminution de la mortalité
cardiovasculaire. Cependant, la courbe de mortalité remonte audessus
de l'incidence chez les contrôles lorsque la consommation
devient trop forte. Cette même méta-analyse a également montré
qu'il existe un bénéfice, bien que moins important et durable, avec une
consommation modérée de bière, ce qui témoigne d'un double effet de l'alcool en règle générale et d'un effet spécifique du vin.

D'un point de vue anatomique lorsque l'on examine les coupes
d'artères, on peut observer les plaques d'athérosclérose - ce qu'André
Vacheron décrivait comme des taupinières - qui occupent l'épaisseur
des parois, les fragilisant expliquant que ces lésions puissent s'ouvrir
dans la lumière artérielle. Cette rupture de plaque d'athérosclérose,
entraîne une réaction de coagulation nommée thrombose, ce qui permet
de comprendre que la pathologie au total soit l'athérothrombose c'està-
dire l'association des lésions d'athérosclérose et des réactions de
thrombose.
Globalement, les études épidémiologiques démontrent une
diminution des événements liés à l'athérothrombose lors d'une
consommation modérée et régulière de vin. Il reste cependant à
déterminer si cette consommation a des effets bénéfiques sur la partie
« thrombose» ou sur la partie « athéro » de l'athérothrombose.
Parmi les animaux de laboratoire c'est la souris qui est le
plus fréquemment utilisée car c'est l'animal le plus facilement
manipulable. En étudiant le comportement de souris naturellement
hypercholestérolémiques (qui vont donc développer des lésions
artérielles proches de l'athérosclérose) et en leur donnant un régime
enrichi en vin, peu d'études ont montré un effet réducteur sur
l'athérosclérose. En revanche, de manière assez constante un effet
a été montré sur la composante thrombotique. Nous avons donc
l'impression que le vin dans son effet anti athérothrombose a un effet
plus antithrombotique qu'anti-athérosclérose.
D'autres souris ayant une mutation sur le récepteur aux LDL (les
lipoprotéines qui portent le cholestérol) peuvent été utilisées. Nous et
d'autres avons constaté qu'il n'existait pas d'effet sur l'athérosclérose à
court terme, mais à nouveau un effet sur la thrombose. Cependant, à
long terme, l'effet sur la thrombose tendait à disparaître.
Nous nous sommes tournés vers des animaux d'expérience plus
représentatifs: les porcs - car le porc est l'animal ayant le plus de
ressemblances avec l'être humain et nous avons sélectionné des porcs
pour être spontanément hypercholestérolémiques (comme les humains)
et donc développer « naturellement » des lésions d'athérosclérose -
et nous avons étudié l'effet d'une consommation régulière de vin par ces derniers. Comme le vin est composé d'alcool et de polyphénols,
nous nous sommes donc demandés quel élément était potentiellement
bénéfique pour la santé. Nous avons ainsi commencé notre étude
en regardant à court et à long terme l'action du vin dans lequel on
avait retiré l'alcool. Et alors nous avons constaté qu'il n'y avait pas
d'effet très important sur l'athérothrombose à court terme. Pourtant,
les données de la littérature sur les bénéfices du vin sur la santé, sont
assez cohérentes à montrer qu'une grande partie de ces bénéfices
proviendrait des polyphénols. Après des expériences longues (2 ans),
nous avons constaté sur l'athérosclérose qu'il n'y avait pas d'effet sur
la taille des lésions, mais sur leur gravité, avec une diminution des
calcifications des plaques d'athérosclérose.
En poursuivant l'étude, nous avons essayé de rendre les animaux
beaucoup plus athéromateux en leur donnant en plus des régimes
riches en lipides (comme l'alimentation humaine habituelle). Dans ces
conditions, nous avons constaté que l'action des phénols du vin était
peu opérante.
Nous avons poursuivi nos travaux en donnant véritablement du
vin (c'est-à-dire à la fois l'alcool et les phénols) à nos animaux. Une
nouvelle étude a été conduite en utilisant les animaux pendant 2 ans.
Nous avons repéré un petit effet sur l'athérosclérose, en particulier
sur les artères périphériques. Nous avons également constaté une
diminution de la réponse thrombotique. Le régime associant du vin
limite la glycémie et donc n'augmente pas les risques de diabète.
Nous avons aussi mis en lumière un petit effet antithrombotique sur
l'agrégation plaquettaire.
Comme je le disais, le vin est composé d'alcool et de polyphénols.
L:alcool a des effets sur les lipoprotéines et sur la paroi vasculaire.
Les phénols du vin entraînent une stimulation de la production de
monoxydes d'azote. La réactivité vasculaire de nos animaux a été
étudiée par le groupe CNRS de Strasbourg: le vin favorise la dilatation
des artères en particulier périphériques. Le suivi de nos animaux, a
montré que les animaux âgés qui n'ont pas eu de supplément en vin
pour leur boisson ont des artères qui se dilatent de moins en moins
bien au fur et à mesure du vieillissement.

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