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18 mars 2019

Alain Déjean et Rousset Peyraguey devant la justice


Le vigneron de Sauternes continue de défendre ses solutions alternatives pour ne pas arracher une parcelle. Tandis que les traitements obligatoires contre la maladie de quarantaine sont relancés sur sa commune.

« Tout sera fini ce 31 octobre, par un jugement » affirme avec assurance le vigneron Alain Déjean (domaine Rousset Peyraguey). Passant devant le tribunal administratif de Bordeaux pour ne pas avoir réglé en 2016 une facture de 6.171,56 € HT au Laboratoire Départemental d’Analyse, l’exploitant lie ce refus à celui d’arracher une parcelle jugée contaminée par la flavescence dorée depuis 2015. Figure pour le moins iconoclaste de Sauternes*, Alain Déjean réfute depuis trois ans le diagnostic du Groupement de défense contre les organismes nuisibles des Graves et du Sauternais (GDON). Ses experts ayant prospecté une parcelle du domaine Rousset Peyraguey et estimé qu’elle était contaminée à plus 20 % de ses ceps par le phytoplasme de la flavescence dorée.

Rejetant en bloc cette évaluation, Alain Déjean refuse de se plier à l’arrêté préfectoral imposant d’arracher les parcelles de vignes infectées par la maladie de quarantaine.  Le vigneron estime depuis 2015 qu’il y a une surestimation des syndromes sur de vieilles vignes touchées par l’esca. Alain Déjean assure également qu’un traitement naturel des ceps infectés permettra de guérir les ceps touchés.

Pour résoudre cette impasse, le GDON et le Service régional de l’alimentation (SRAL) se sont accordés en septembre 2016 sur un protocole dérogatoire avec Alain Déjean afin d’analyser, à titre expérimental, sa parcelle et en vérifier la contamination réelle, pied par pied. Réalisés en urgence par le Laboratoire départemental d’analyse sur commande du SRAL (le premier étant prestataire, le deuxième commanditaire), 277 tests PCR en temps réel ont été menés. Le devis se basant sur l’engagement d’Alain Déjean de les régler. Ce qu’il refuse obstinément, estimant que la procédure est viciée d'irrégularités depuis l’origine.

« Le GDON a compté 900 pieds sur ma parcelle, il y en a plus de 1 200 en réalité. Ce qui fait que le taux de contamination ne dépasse pas 18 %. Le nombre de pieds dans la parcelle a été volontairement diminué ! » clame Alain Déjean, qui accuse clairement le GDON de mentir et laisse la porte ouverte à de futures poursuites au civil. « Tout dépend de ce que l’on appelle un pied de vigne… Il y a beaucoup de repousses de porte-greffe dans cette parcelle » note Catherine Bastiat, la directrice du GDON. Des arguments qui ne tiennent pas pour Alain Déjean, qui rejette « des mensonges ».

« Il faut voir les faits ! » clame-t-il, sans pour autant vouloir communiquer, « pour l’instant », les résultats des analyses effectuées en 2016. Il souligne, en revanche, que s’il a arraché dix pieds sur la parcelle, il n’en a plus que 4 atteints par la flavescence dorée. « Je reproche au GDON ne pas chercher à savoir. Je ne dis pas que j’ai la solution, mais j’ai des résultats avec des élixirs de minéraux pulvérisés à la taille » soupire-t-il. Soulignant qu’il traite la flavescence dorée : « on ne part pas comme ça avec du purin d’orties et des prières à la Vierge Marie ! La recherche doit se pencher sur d’autres solutions, et pas que sur du poison contre des insectes »

« Je suis tout à fait d’accord sur la problématique des insecticides, ce n’est pas une solution. Notre objectif est d’arrêter de traiter, mais pour cela il faut une gestion de l’épidémie par la surveillance et l’arrachage des pieds touchés » réplique Catherine Bastiat. Reposant sur une analyse de risque sur les 7 000 hectares du GDON, le dispositif actuel a permis de réduire de 24 000 à 1 400 le nombre de pieds positifs, entre la première prospection de 2011 et celle de 2018. Une gestion collective dont la mécanique de précision est enrayée par le foyer d’Alain Déjean  entend-on dans le vignoble voisin.

« Sa démarche n’est pas crédible. On a dû relancer les traitements à cause de son obstination »enrage, anonymement, un vigneron voisin, qui rit jaune devant l’image de « vignes Koh-Lanta »pour décrire les parcelles du domaine Rousset Peyraguey. « On reproche à Alain Déjean de ne pas arracher un pied quand il est contaminé » martèle Xavier Planty, le président du syndicat viticole de Sauternes et du GDON. « Par sa faute, toute la commune de Fargues est obligée de traiter cette année. Alors qu’il n’y a pas d’autres foyers que lui… »

 « Vous ne pouvez pas dire que toute la commune est traitée à cause de moi ! » s’emporte Alain Déjean, qui dit « régler son problème de flavescence dorée sans poison. Je n’ai plus que 4 pieds atteints ! » Se disant à demi-mot très affecté par la procédure, Alain Déjean se réserve la possibilité de faire appel si la décision du 31 octobre ne va pas dans son sens. La conclusion de cette affaire reste donc en suspens.

Contactés, le département de Gironde (dont dépend le Laboratoire d'Analyses Départemental) et la préfecture (dont dépend le SRAL) n'ont pas souhaité commenter ce contentieux.

* : Depuis le millésime 2010, son domaine est sorti de l’AOC et a créé son label privé de biodynamie (sans être certifié en bio).

Qu’en est-il de la procédure de la préfecture ?

En refusant d’arracher sa parcelle, Alain Déjean contrevient à l’arrêté du 19 décembre 2013 (« relatif à la lutte contre la Flavescence dorée de la vigne et contre son agent vecteur ») et à l’arrêté préfectoral du 23 juin 2014 (de « lutte contre la flavescence dorée »). À ce titre, il a été mis en demeure de se conformer à la réglementation, ce qu’il a contesté au tribunal administratif. Face à un vice de forme soulevé (une absence de courrier recommandé pour garantir le principe du contradictoire), la préfecture a retiré sa mise en demeure en 2017, pour la relancer ce 7 juillet 2018. « Cette seconde décision fait également l'objet d'un recours sur lequel le Tribunal devrait statuer dans les prochaines semaines » nous précise la Préfecture. « Il y a eu non-lieu, vous ne pouvez pas relancer la procédure sans de nouvelles mesures » rejette Alain Déjean, qui estime qu’il ne peut plus être attaqué pour son refus d’arrachage.
 

D'après Alexandre Abellan deVitisphère

Vendredi   15 mars le préfet a diligenté une brigade de gendarmerie et à fait arraché les 1600 ceps de la parcelle. La facture d'environ 1600 € sera adressée au vigneron.

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